Et, brillant aux carreaux, le bric-à-brac confus.
Baudelaire
Elle changera plus vite que le coeur d'un mortel, cette Cité bâtie en brefs éclats de formes et de couleurs, mais nul ici ne s'en plaindra. Le bien-nommé Clan des songes revient enchanter le TNT - et désormais la Scène nationale d'Albi - avec un nouveau spectacle à l'attention du très jeune public. Dans le passé, le Clou a eu l'occasion de goûter ses créations ciselées autour d'un concept fort simple (Fragile en 2011, ici) : ce mélange entre précision du sujet et complexité technique se retrouve dans Cité, étonnant travail au croisement de la marionnette, du théâtre d'ombres et du graphisme.
"Les fenêtres ouvrent les yeux,
sont-elles vivantes ?"
(Marina Montefusco)
Encore une fois, rien de racontable. Plutôt des éclats de réalité assemblés aléatoirement et tirés vers le surréalisme, qui s'en remettent à l'imagination de l'enfant, aux références de chacun - fugitifs bouts de vie ou de signification, à la semblance de cette fourmilière sensorielle qu'est une ville. Une composition en mouvement, multiple et fragmentaire, avec pour seul fil rouge, peut-être, la poussée des gratte-ciel. Des brins d'histoires se mêlant au gré d'une géométrie vivante qui s'assemble, s'imbrique, disparaît dans une couleur et revient dans une autre, le tout sur un fond noir, à l'image de l'oeuvre d'Evsa Model, peintre auquel le spectacle rend hommage: des carrés, des ronds, des petits, des grands - de petits ronds comme des pupilles dans de grands carrés, de petites fenêtres dans de grandes tours ; de minuscules bobines de bonhomme en promenade, des ballons à se lancer, d'immenses soleils qui toujours dénoncent Icare en l'homme bâtisseur. Si la référence au constructivisme est évidente, le peintre autrichien Hundertwasser n'est pas loin non plus en ce qui concerne la débauche de couleurs et l'onirisme urbain. Le foisonnement en moins, bien sûr : épure et rigueur des formes.
Une grande simplicité de concept, et cependant quelle technique derrière ! Les jeux de lumière, entre autres, sont pour beaucoup dans la magie et l'énergie visuelle de l'ensemble. Pour quitter ici le strict terrain de la marionnette, la compagnie n'en déploie pas moins d'agilité, de précision et de contraintes rythmiques. Musique, bruitages et fugitifs dialogues achèvent de prêter vie aux manipulations d'images - non sans humour, et les rires des tout petits le disputent aux exclamations de surprise. La dimension d'éveil, impliquée par la tranche d'âge visée (dès 3 ans) est ici assumée jusqu'au trognon : les formes, les couleurs et les sons dialoguent dans la perspective d'une métamorphose continuelle, d'un déplacement du sens, d'un univers à réinventer à l'appui d'un simple mouvement, d'une brève onomatopée. Et quand il s'agit de réinventer, les petites mirettes ne sont pas de reste.
Encore une création à l'unité esthétique saisissante de la part du Clan des songes.
lecloudanslaplanche.com
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Bonjour,
C'est avec un immense plaisir que j'ai découvert, avec mon fils de 6 ans, votre dernière création au TNT, "CITÉ".
Encore une fois, rien n'est laissé au hasard, chaque détail compte... une orchestration au dixième de millimètre.
Couleur, Musique, Lumière jonglent et se superposent savoureusement pour nous offrir, aux plus petits comme aux grands, un moment hors du temps où l'imaginaire se laisse porter dans un univers graphique, hypnotique et ludique.
Après avoir découvert toute la poésie de "FRAGILE", je suis ravie d'avoir partagé "CITÉ" avec mon petit qui s'amuse depuis à associer forme et son.
Je tiens également à vous féliciter pour votre démarche qui ne s'arrête pas au spectacle mais va bien plus loin avec l'espace de manipulation que vous proposez à la sortie. Ces "boîtes" - ingénieuses et particulièrement bien fabriquées ! - apprennent à regarder (phénomène que beaucoup de gens ne savent malheureusement plus faire naturellement) et à se questionner tout en s'amusant.
Bref, Chapeaux bas !!! |
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